lundi 11 avril 2011

Stigmatisation

Il règne en ce moment dans notre pays un climat délétère. Entre la dame qui se prend pour la réincarnation de Jeanne d'Arc et veut bouter les arabes hors de France, le nouveau ministre de l'intérieur qui arrive à faire pire que son prédécesseur ce qui déjà est une prouesse, le débat sur l'identité nationale voulu par le sommet de l'Etat et qui embarrasse tout le monde, représentants des différents cultes compris, ça fait beaucoup ! Personnellement, je vois passer dans ma boîte mail et sur Fessebouc des appels nauséabonds à se protéger des envahisseurs qui me font monter la bile dans la gorge. Heureusement, cette semaine dans la presse, plusieurs articles sur le reportage du photographe Britannique Martin Parr (photo) à la Goutte d'or à Paris viennent relever le débat et nous rappeler que oui, on peut trouver chez nous des communautés bigarrées, sympathiques,  bien intégrées, et qui ne font pas de bruit. Mais de celles-là, on ne parle pas. Selon un mot à la mode dont les médias raffolent en ce moment, on préfère stigmatiser. Stigmatisés donc, les tournantes dans les banlieues, les femmes cachées sous leur burqa et les hommes qui prient dans la rue. Réalité qui si elle existe, ne nous voilons pas la face, n'est pas la seule. J'ai déjà évoqué ce quartier Bordelais où nous sommes arrivés un peu par hasard et dans lequel je me sens bien. En bas de chez moi, mon voisin s'appelle Driss, il  tient un magasin de mobilier et de décoration marocain, c'est un homme de bon goût, raffiné, d'une grande courtoisie, toujours prêt à rendre service. Juste en face, nous avons nos habitudes dans un restaurant qui fait le meilleur couscous à l'agneau du monde, des pâtisseries orientales à se lécher les doigts et dont le patron est un jeune homme de 28 ans, sérieux, exigeant, prévenant, commerçant. J'apprécie son thé à la menthe en fin de repas et, un jour où j'étais enrhumée, il m'a soignée avec une décoction au camphre radicale. Je pourrais vous parler du couturier qui en vingt minutes et pour un prix modique vous fait un ourlet de pantalon (alors que trouver une retoucheuse de nos jours relève du parcours du combattant) ou encore de Racha, ma coiffeuse, mi-marocaine, mi-égyptienne qui est devenue une copine. Dans son salon aux murs badigeonnés d'une belle couleur brique, il règne une atmosphère délicieusement féminine, cosmopolite, on se prête les magazines, on papote de la pluie et du beau temps, un peu comme dans ce joli film, Caramel. Ce quartier, je l'aime, et cette France multicolore où j'ai grandi, c'est celle-là que je veux, pas cette autre qu'on voudrait me vendre, protectionniste, aseptisée, frileuse. En un mot, triste.     

11 commentaires:

Lilie a dit…

Je suis à 3000 % d'accord avec toi. Je ne veux pas vivre dans un pays où tout le monde se ressemble, parle de la même façon, a cessé de penser pour suivre le même mouvement.
Quand les gens comprendront-ils que ce n'est pas par l'ignorance qu'on accède au respect de l'autre ?
Et si on remplaçait "stigmatisation" par "métissage", elle serait pas magnifique notre douce France ? :)

Hermione a dit…

Vendredi, une enseignante de mon université me parlait et m'a dit textuellement "dans mon lotissement, il y a une famille maghrébine mais très bien"... J'ai parfois l'impression que la France est un terreau fertile pour le refus de l'autre.
Sinon j'ai beaucoup aimé Caramel aussi :)

La petite poule noire a dit…

@ Lilie, le fait est que le métissage est une réalité et ce qui a toujours fait notre richesse. D'aucuns devraient relire les Ritals de Cavanna...
@ Hermione, tout est dans le mais.

bricol-girl a dit…

Ah si le mais était banni de la langue française...

KooKie a dit…

Mon commentaire sera sans doute bloqué à la phase modération; mais c'est vous, auteur, que je tenais à toucher.

Comparer votre expérience personnelle à la réalité des chiffres, que l'on nous cache, n'est pas valable.

Si cette minorité intégrée existe chez les commerçants, pour qui l'image et la bonne entente avec les clients sont primordiales notamment; la part sombre de l'immigration est encore plus réelle.
Et allez demander de l'aide à un tout-venant dans ces "quartiers", où les lois de la République n'ont plus cours.

Ouvrez les yeux ou sortez de bisounours'land ;)

La petite poule noire a dit…

@ Kookie, détrompez-vous je publie votre comm. Et je persiste et signe. Je n'ai pas la prétention de comparer mon expérience personnelle à quoi que ce soit. C'est mon blog et évidemment, je parle de ce que je connais. Dans mon quartier où plusieurs communautés se côtoient, pas de femmes en burqa, peu d'incivilité et au contraire, une vraie solidarité entre voisins, commerçants, etc. Quant au pays des Bisounours, je viens de passer un an en Inde où j'ai vu à la fois la misère, la violence mais aussi beaucoup de beauté. Donc non, je ne pense pas être une idéaliste, juste quelqu'un qui n'a pas envie de voir son pays rétrécir à en devenir autiste.

Simplement ... a dit…

Apprendre à se respecter serait déjà bien ...
Bisous chère Petite poule noire.
Marie-Ange

Brigitte a dit…

Je connais des personnes qui ont un discours front national , qui vivent tout tranquillement chez eux sans aucun noir , maghrébien mais qui regardent trop les actualités et qui prennent peur ; On ne montre pas assez les actions positives , la délinquance n'a pas de couleur .

heure-bleue a dit…

C'est à cause de ça que je n'aime plus vraiment mon quartier d'enfance, pas de mixité...

Une jeune femme de france a dit…

je rêve de votre vision des choses, mais ayant cohabité près de 2 ans avec une population quasiment 100 % maghrébine, je peux vous dire que l'on change de discours après !
je ne suis pas extrémiste, et la France a besoin de couleurs, de coutumes, et de vécus différents.
Mais ayant maintes fois entendu que je n'étais pas chez moi, permettez moi de penser que si, je le suis, et bien plus qu'eux...
Oui, bien plus qu'eux, car pour la plupart, leur parents ne parlent pas français, ils sont communautaires, se sentent supérieurs et nous le font savoir ! ne surtout pas les soutenir du regard, et si l'on a la moindre anicroche avec l'un deux, nous sommes racistes !
Vous pouvez allez en Inde ou là où ça vous chante,
Mais la "nouvelle Jeanne d'arc" comme vous dites ne dis pas que des bêtises, et moi je ne suis pas une vieille, qui regarde TF1... non non, et j'ai du m'éloigner de tout ça, dans un petit coin de campagne, afin que mes déceptions ne deviennent pas de la haine...
Alors oui, yen a marre, pas de ce brave Idriss, pas de votre amie Racha ! mais de tout ceux qui profitent de la france, sans honte !
ça aussi vous devriez le comprendre !
Merci tout de même de votre point de vue, que je respecte...

Anonyme a dit…

Quel bien beau post, qui illumine en effet le quotidien grisatre de ces derniers jours.
Nous oublions sans doute trop facilement que de près ou de loin nous sommes tous un peu des immigrés...