mardi 6 mai 2008

Babel Tower

Depuis six mois, nous accueillons chez nous une jeune Allemande de 17 ans scolarisée avec notre fille. Nous lui avons proposé de l'amener passer un week-end à Paris. Quand elle nous a présenté la liste des "incontournables" qu'elle souhaitait voir, j'ai un peu fait la grimace : rien ne nous était épargné. Nous avons réussi à échapper au Louvre arguant qu'il y aurait trop de monde et que nous ne verrions rien en si peu de temps, et en lui proposant Orsay "à la place", mais la Tour Eiffel, elle y tenait. Son argument était du reste imparable : "Demandez à n'importe qui dans le monde ce qu'évoque Paris pour lui, et il répondra : la Tour Eiffel".
Nous voilà donc en ce jour J de vacances scolaires, et pas seulement les nôtres mais celles d'une grande partie de l'Europe si j'en juge par le monde partout. Le temps est avec nous, premier jour de vrai printemps, chaud mais pas trop, ciel bleu azuréen, parfait. Éric et les filles choisissent de rallier le Boulevard Raspail au Champ de Mars en Vélib (Merci M. Delanoë !) Prudente, je préfère prendre le bus. Las, j'ai perdu mes réflexes de Parisienne oubliant que les bus ne font souvent pas le même trajet à l'aller et au retour, je ne descends pas au bon arrêt, me retrouve Rive Droite obligée de traverser les Tuileries puis la Seine, pour finir par prendre le métro à Solferino, la honte !
Bref, quand j'arrive enfin au pied de la Grande Dame de Fer, c'est pour constater que mes compagnons cyclistes ont commencé deux queues différentes, l'une vers le pilier Nord et l'autre Est. Pas une queue bien ordonnée à la Disneyland, non, une queue bien de chez nous, foutoir assuré. On se dit qu'on en a bien pour deux heures en étant optimiste. Nos estomacs commencent à crier famine, le brunch est déjà loin. Comment va-t-on tuer le temps ? Facile, il suffit de tailler une bavette avec ses voisins. Quand j'arrive, mon petit mari toujours aussi sociable a fait ami-ami avec une grand-mère qui a voulu gâter sa petite-fille provinciale. Laquelle gamine commence à avoir faim elle aussi. Qu'à cela ne tienne, allez-y Madame, la baraque à frites vous tend les bras et on va vous garder votre place dans la queue. Au fil du temps, j'apprendrai que c'est une authentique Parisienne du 9è, qu'elle a fait les marchés pendant 40 ans, qu'elle a six petits-enfants qu'elle a invités hier au restaurant, Place du Tertre. Derrière nous, quatre jeunes filles se prennent mutuellement en photo. Je les crois Américaines et leur propose de les photographier ensemble, ce que bien sûr, elles acceptent avec plaisir. J'apprends qu'elles sont Sud-africaines, originaires des environs de Durban et qu'elles ne passent que 48 heures à Paris avant d'aller à Rome, Vienne et Londres !
Quand enfin, on touche au but, un groupe de Japonais nous précède. Cafouillage, palabres. Finalement, leur guide nous fait signe de les doubler ce qui nous fait gagner au bas mot vingt places. Visiblement sortis d'embarras, nous les retrouvons dans l'ascenseur. C'est là que d'un ton péremptoire, le liftier me corrige : ce sont des Chinois. Ah bon ? Et on les reconnaît à quoi ... ? Et de préciser : les Chinois ont remplacé les Japonais à Paris. Ah bon !
Un peu plus tard, après avoir admiré la vue largement méritée, il est temps de redescendre. Je refais la queue en attendant l'ascenseur. Deux couples grands, superbes, échangent en ce qui me semble être du russe. A un moment, l'un d'eux me bouscule et me dit "Scusa, Signora !
" Euh, non, ch'uis française. Si, si, y en a encore un peu par ici ...

Aucun commentaire: