dimanche 11 septembre 2011

Ten Years Ago (III)

J’ai encore aujourd’hui du mal à exprimer ce que j’ai ressenti en voyant ces images quand peu de temps après avoir appris la terrible nouvelle, nous nous sommes à notre tour réfugiés dans un café de Sark. Virginie et les autres qui revenaient de leur balade à vélo nous ont rejoints et là, dans ce qui nous avait paru être un de ces endroits privilégiés à peine touchés par le progrès technique, nous avons remarqué soudain le taux d’équipement en radios, ordinateurs et télés. Dans chaque boutique de souvenirs, bistrot ou hôtel, les gens se sont agglutinés autour de la lucarne magique comme aimantés. Le nôtre avait un écran géant et nous étions là debout, sidérés, répétant "c’est pas possible, c’est pas possible, oh mon Dieu !". Virginie a proposé un alcool fort à chacun, certains se sont mis à tirer fébrilement sur leur cigarette et quand, au bout d’un moment, quelqu’un a proposé de se mettre en terrasse pour finir nos verres, il en restait toujours un à l’intérieur qui n’arrivait pas à détacher ses yeux de l’écran. Même les plus blasés parmi ces journalistes, Marc le vieux routier du Monde, Philippe qui avait couvert pour Sygma un grand nombre de guerres, tous étaient complètement retournés. Nous étions bien loin de ce brave Victor et de ses Travailleurs de la mer, des turpitudes de son exil, et de ses amours contingentes avec sa Juliette… Bienvenue dans le 21ème siècle ! Comme si le symbole de Manhattan mutilé ne suffisait pas, on apprenait qu’un troisième avion avait été lancé contre le Pentagone à Washington faisant encore 200 morts et qu’un quatrième s’était écrasé du côte de Pittsburgh. On a dit ensuite qu’il aurait normalement dû atteindre la Maison Blanche ou encore l’avion d’Air Force 1 qui transportait à ce moment-là le Président des États-Unis, George W. Bush, celui-là même que nous avions tendance à prendre pour un "neuneu". Le soir, nous avions une veillée prévue autour du film de Truffaut, Adèle H., ce que tout le monde s’est empressé d’oublier. Ce qui devait être un moment privilégié, c’est en effet assez rare de dormir à Sark car l’hôtellerie est limitée en capacité, s’est transformé en dîner très animé, très "retour brutal sur terre". Le lendemain, nous regagnions la France via Guernesey où nous nous sommes jetés de manière frénétique sur tous les journaux. Le Times titrait "When War Cames to America". Et c’était bien de guerre dont il s’agissait.


7 commentaires:

Simplement ... a dit…

Quelle tristesse ...
La barbarie à l'état pur ...
Nous n'oublierons jamais, jamais ...
Je t'embrasse
Marie-Ange

liwymi a dit…

J'étais en vacances avec mon compagnon en Charente. J'étais très très enceinte. On a appris la nouvelle par la radio, dans la voiture, sur un parking de supermarché ! On s'est empressés de louer une télé, dans la résidence où nous logions. Et comme tu l'écris, nous avons visionné les mêmess séquences ad nauseam. Notamment celles où on voyait des gens se jeter par les fenêtres. J'ai même fait une espèce de crise d'angoisse (ce qui ne m'était jamais arrivé). Et j'ai toujours pensé que ma petite Nausicaa, à un mois de sa naissance, avait ressenti toutes ces émotions négatives.

J'ai revu hier soir le film des frères Naudet et cela me laisse toujours dans un état de sidération.

le bord doré des nuages a dit…

il y a une journée complète sur Arte sur NY ce dimanche,est ce que tu regardes?

Hermione a dit…

J'ai essayé de regarder CNN, mais je trouve ça insoutenable.

bricol-girl a dit…

Sidération c'est bien le terme, Sur la 5 hier soir des vidéos amateurs, un autre regard.

Marie-Madeleine a dit…

La guerre hélas est tellement partout! mais là, on peut dire que c'est le comble

le bord doré des nuages a dit…

je reviens encore relire ton billet.. comme tu écrit vrai! cette image de la liberté en sanglot est extraordinairement poignante.
Passes une belle journée qui s'annonce très ensoleillée, la vie continue.